Lorsque l'humain devient marchandise

Lorsque l'humain devient marchandise

Oft sind die Ketten der modernen Sklaverei unsichtbar. Dennoch kann sie an konkreten Merkmalen erkannt werden. / Les chaînes de l’esclavage moderne sont souvent invisibles, mais on peut les reconnaitre.
Oft sind die Ketten der modernen Sklaverei unsichtbar. Dennoch kann sie an konkreten Merkmalen erkannt werden. / Les chaînes de l’esclavage moderne sont souvent invisibles, mais on peut les reconnaitre.
© MrAnathema, Flickr.com / Libre de droits

Dans la lutte contre la traite des êtres humains, l'Armée du Salut met en place une stratégie de sensibilisation et d’information.

L’Organisation internationale du travail estime qu’environ 21 millions d’individus sont victimes de travail forcé à travers le monde. Cela se passe aussi en Suisse.

Parmi ces victimes, 18.7 millions (soit 90%) sont exploités dans l’économie privée, par des particuliers ou des entreprises privées; les 2.2 millions restant (10%) sont concernés par des formes de travail forcé imposées par l’Etat. Parmi les personnes exploitées par les particuliers et les entreprises privées, 4.5 millions (soit 22%) sont victimes d’exploitation sexuelle et 14.2 millions (68%) sont victimes de travail forcé. Toujours selon l’OIT, le travail forcé génèrerait 150 milliards de dollars de profits illégaux par an dans l’économie privée. Ces chiffres sont évidemment des estimations difficiles à contrôler, les activités illicites étant cachées. La réalité pourrait être encore bien plus triste. Tous les Etats sont affectés par la traite des personnes, comme pays d’origine, de transit ou de destination des victimes.

Selon la major Christine Volet, responsable du Service justice sociale de l’Armée du Salut en Suisse, les migrants sont particulièrement exposés. « C’est une population fragilisée pour qui le danger de tomber dans les mailles des trafiquants est constant. Les facteurs qui entrent en jeu sont nombreux. Ils ont souvent dépensé toutes leurs économies pour payer des passeurs peu scrupuleux. Leur famille a placé tous leurs espoirs de survie sur eux. Et ils ne connaissent souvent pas leurs droits. » Toutes ces raisons poussent ces personnes à accepter du travail illégal dans des exploitations agricoles, sur des chantiers, dans des restaurants, ou encore sur le marché du sexe. « Parfois ce sont même les familles qui vendent leurs filles et il est très difficile de faire comprendre à ces femmes exploitées qu’elles ont une valeur en tant qu’être humain et non juste une valeur marchande », ajoute Christine Volet.

Chacun doit être impliqué
Pour combattre ce fléau, l’Armée du Salut met en place une stratégie de sensibilisation et d’information, et participe à la dénonciation de cas de traite. Pour pouvoir être efficaces, il faut qu’un maximum de monde soit attentif à ce problème. Dans cette lutte, chacun a un rôle à jouer. Dans le cadre de la Journée mondiale de la dignité des victimes de la traite d’êtres humains (30 juillet), le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, a affirmé : « Les personnes les plus désespérées et les plus vulnérables sont la proie des trafiquants. Pour mettre fin à ces pratiques inhumaines, il faut aller plus loin dans la protection des migrants et des réfugiés, en particulier des jeunes, des femmes et des enfants, contre ceux qui voudraient exploiter leurs aspirations à un avenir meilleur, plus sûr et plus digne. » Mais comment faire concrètement ?

Reconnaître les signes
Les chaînes de l’esclavage moderne sont souvent invisibles. Les menaces, les mensonges et l’influence psychologique perfide de la part des trafiquants empêchent les victimes de se libérer elles-mêmes. Les victimes ne se reconnaissent pas forcément comme telles. Vous pouvez rencontrer ces personnes dans la vie quotidienne sans le remarquer. Les trafiquants déplacent souvent leurs victimes afin qu’elles ne puissent pas s’orienter et qu’elles ne soient pas reconnues. La liste suivante répertorie les signaux d’avertissement qui peuvent indiquer qu’on a à faire à de la traite d’êtres humains. Ces signes ne sont pas présents dans tous les cas de traite des êtres humains et pas toujours dans leur intégralité.

Situation de travail et de vie désolants
La personne

  • N’est pas libre d’aller et venir comme elle l’aimerait
  • A moins de 18 ans et fournit des services sexuels
  • Effectue des travaux non rémunérés, mal payés ou payés seulement par pourboire
  • Effectue des travaux exceptionnellement longs et à des moments inhabituels
  • N’a droit à aucune pause ou subit des restrictions inhabituelles au travail
  • Est très endettée et incapable de rembourser la dette
  • A été embauchée avec de fausses promesses quant à la nature et aux conditions de travail
  • Vit ou travaille sous des mesures de sécurité élevées (p. ex. fenêtres teintées, verrouillées ou barrées, barbelés, caméras de surveillance, etc.)

Mauvaise santé mentale ou anomalies comportementales

  • Est anxieuse, dangereuse, déprimée, soumise, tendue ou paranoïaque
  • Se comporte de manière extrêmement incertaine et angoissée lorsqu’il est question de loi
  • Evite le contact visuel
  • Souffre de problèmes de santé
  • Semble mal nourrie
  • Montre des signes d’abus physiques ou sexuels, de violences physiques, de privation de liberté ou de torture

Absence de contrôle

  • N’a pas ou peu de biens personnels
  • N’a aucun contrôle sur son propre argent, ses dossiers financiers, son compte bancaire

Autres

  • Prétend n’être qu’en visite et ne peut pas donner d’informations claires sur l’endroit où elle vit
  • Ne connaît pas son lieu de séjour et ne sait pas dans quelle ville elle se trouve
  • N’a pas la notion du temps
  • Exprime des incohérences ou des contradictions dans son histoire

Si vous observez ces signes ou que vous avez un soupçon de traite d’êtres humains, vous pouvez contacter Act212 ou 0840 212 212. Il est possible de remplir un formulaire de façon anonyme. Vous pouvez également contacter LAVI, une association d’accompagnement de victime. Ou encore l’annoncer à la police locale, si la personne est d’accord ou que sa vie est en danger.

Demandez également le manuel sur le travail forcé au Service justice-sociale de l’Armée du Salut.

 

Auteur
Sébastien Goetschmann

Publié le
3.10.2017